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"A mesure qu'on vieillit, les fantômes s'éloignent. Des années durant, ils nous suivent d'une démarche incertaine et nous ralentissent, car il est impossible de presser le pas pour fuir ou dépasser le grand frère assassiné à dix-sept ans, alors qu'on en avait tout juste onze." Déportée et rescapée d'Auschwitz, Ruth Klüger nous racontait, avec Refus de témoigner (éditions Viviane Hamy, prix Mémoire de la Shoah 1998), sa jeunesse et son exil à seize ans aux Etats-Unis.
Dans Perdu en chemin, nous la découvrons adulte, confrontée au quotidien des années cinquante, en pleine lutte pour obtenir dignité, respect et reconnaissance de soi. Devenue une germaniste réputée, nommée docteur honoris causa de l'université de Göttingen, elle poursuit le débat avec elle-même : quels sont les mécanismes de la mémoire individuelle et collective vis-à-vis des horreurs du passé, de leurs victimes, auteurs et témoins ? Le fil du récit est la discrimination intimement ressentie et constante, mais aussi celui d'une double émancipation : celle d'une Juive et celle d'une femme.
Nous sommes submergés par sa sincérité, sa générosité et son intelligence souveraine.