« Bye bye mother fakir » c’est ce qui vient à l’esprit de John Nichols lorsqu’on lui apprend le suicide de son ami Alan Mustgrave au cours d’un show sado-maso dans une boîte branchée de Paris. Voilà un début qui déstabilise, à l’image de la totalité du roman. En trois mots je dirais que Fakirs est un roman policier dérangeant, troublant, mais quand même touchant.
A l’histoire de ce John Nichols, psychologue américain qui part sur les traces de son ami fakir à la recherche des raisons de son suicide, se superpose celle du lieutenant Guérin, chef de la Section Suicide
de la police judiciaire. Deux intrigues parallèles qui finissent par se croiser, voilà le schéma classique du roman policier.
Mais en dehors de cela, aucun classicisme. Antonin Varenne semble prendre un malin plaisir à nous plonger dans la noirceur de ce Paris sombre et glauque, où la détresse pousse presque toujours au suicide. Entre les deux histoires, on fait en effet le tour de la question du suicide. On en vient à se demander qui est la vraie victime, est-ce que le suicide met en lumière un échec de la société, l’aveu d’une faiblesse personnelle, d’une défaillance psychologique, ou bien encore, hypothèse des plus effrayantes émise par le lieutenant Guérin, est ce qu’il n’y aurait pas des spectateurs attirés par ce genre de spectacle qui s’amuseraient à pousser des personnes sensibles au suicide ? C’est ainsi que devant la description des suicides spectaculaires dont sont chargés les membres de la Section Suicide, j’ai été saisie d’un certain malaise, le pire étant le spectacle final auquel s’ajoute la pression psychologique de la confrontation.
Cependant on ne peut nier que les personnages sont fouillés, aucun d’entre eux n’est tout blanc ou tout noir, ils ont tous leur part d’ombre, ce qui ajoute au mystère de l’enquête. Ils sont tous originaux, et certains se révèlent particulièrement attachants, dont par exemple l’ancien taulard qui redécouvre la liberté, dans une description de la campagne qui frappe par sa poésie.
L’atmosphère globale de Fakirs est très lourde, comme si les suicidés revenaient hanter leurs survivants. En effet, tout ce qui touche au suicide appartient à une zone de non-dit, il n’y a pas la franchise du meurtre mais une violence plus noire, plus sombre, et qui pousse au doute et à la remise en cause de tous les idéaux de ceux qui restent.
Cette réflexion sur le suicide est intimement liée à celle, très intéressante, que John Nichols est censé avoir développée dans sa thèse, sur les bourreaux et les victimes, les torturés et les tortionnaires. On en vient à penser comme lui que le public est le vrai bourreau, et que les tortionnaires ont été façonnés d’une telle manière qu’ils se brisent eux-mêmes en torturant les autres.
Fakirs est donc un roman policier décalé, que j’ai moyennement apprécié, mais qui m’a quand même touchée. Les pointes d’humour allègent heureusement le texte, mais elles ne provoquent pas de rire très expansif et nous font rire jaune, ou plutôt noir, une fois de plus.
Un roman policier dérangeant, troublant, mais quand même touchant
« Bye bye mother fakir » c’est ce qui vient à l’esprit de John Nichols lorsqu’on lui apprend le suicide de son ami Alan Mustgrave au cours d’un show sado-maso dans une boîte branchée de Paris. Voilà un début qui déstabilise, à l’image de la totalité du roman. En trois mots je dirais que Fakirs est un roman policier dérangeant, troublant, mais quand même touchant.
A l’histoire de ce John Nichols, psychologue américain qui part sur les traces de son ami fakir à la recherche des raisons de son suicide, se superpose celle du lieutenant Guérin, chef de la Section Suicide de la police judiciaire. Deux intrigues parallèles qui finissent par se croiser, voilà le schéma classique du roman policier.
Mais en dehors de cela, aucun classicisme. Antonin Varenne semble prendre un malin plaisir à nous plonger dans la noirceur de ce Paris sombre et glauque, où la détresse pousse presque toujours au suicide. Entre les deux histoires, on fait en effet le tour de la question du suicide. On en vient à se demander qui est la vraie victime, est-ce que le suicide met en lumière un échec de la société, l’aveu d’une faiblesse personnelle, d’une défaillance psychologique, ou bien encore, hypothèse des plus effrayantes émise par le lieutenant Guérin, est ce qu’il n’y aurait pas des spectateurs attirés par ce genre de spectacle qui s’amuseraient à pousser des personnes sensibles au suicide ? C’est ainsi que devant la description des suicides spectaculaires dont sont chargés les membres de la Section Suicide, j’ai été saisie d’un certain malaise, le pire étant le spectacle final auquel s’ajoute la pression psychologique de la confrontation.
Cependant on ne peut nier que les personnages sont fouillés, aucun d’entre eux n’est tout blanc ou tout noir, ils ont tous leur part d’ombre, ce qui ajoute au mystère de l’enquête. Ils sont tous originaux, et certains se révèlent particulièrement attachants, dont par exemple l’ancien taulard qui redécouvre la liberté, dans une description de la campagne qui frappe par sa poésie.
L’atmosphère globale de Fakirs est très lourde, comme si les suicidés revenaient hanter leurs survivants. En effet, tout ce qui touche au suicide appartient à une zone de non-dit, il n’y a pas la franchise du meurtre mais une violence plus noire, plus sombre, et qui pousse au doute et à la remise en cause de tous les idéaux de ceux qui restent.
Cette réflexion sur le suicide est intimement liée à celle, très intéressante, que John Nichols est censé avoir développée dans sa thèse, sur les bourreaux et les victimes, les torturés et les tortionnaires. On en vient à penser comme lui que le public est le vrai bourreau, et que les tortionnaires ont été façonnés d’une telle manière qu’ils se brisent eux-mêmes en torturant les autres.
Fakirs est donc un roman policier décalé, que j’ai moyennement apprécié, mais qui m’a quand même touchée. Les pointes d’humour allègent heureusement le texte, mais elles ne provoquent pas de rire très expansif et nous font rire jaune, ou plutôt noir, une fois de plus.