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Francis Marcoin, professeur de Littérature française à l'Université d'Artois, dirige un centre de recherches qui, dans le cadre d'une réflexion sur les rapports entre Littérature et Morale, Littérature et Pensée, Imaginaire et Didactique, a choisi de mettre l'accent sur l'enfance, l'éducation, la littérature enfantine. La comtesse de Ségur est ici resituée dans le contexte de l'édition spécialisée du xixe siècle, dans un environnement thématique et moral qui n'exclut pas une originalité profonde et paradoxale.
En effet, plusieurs principes élémentaires semblent gouverner son oeuvre : le féminin, le religieux, l'aristocratique. Mais ces principes sont toujours illustrés d'une manière équivoque. La comtesse de Ségur résiste donc aux analyses de contenu, et son « message », quelquefois énigmatique, s'oppose même aux engagements officiels de son entourage ultramontaniste. L'ancrage aristocratique est toujours perturbé, mêlé à des valeurs « bourgeoises », tandis que certains textes manifestent une attirance pour la pauvreté, pauvreté de biens ou d'esprit.
Cette complexité, qui requiert une sorte d'humilité de la part du lecteur le plus savant, permet de comprendre pourquoi ces livres, ne s'adressant pas aux enfants d'une classe particulière, conservent aujourd'hui leur puissance d'attraction, et pourquoi, ils n'ont cessé de susciter un intérêt critique. Au-delà de ce cas particulier, il s'agit donc de poser des questions qui touchent à la lecture littéraire, et à l'excès d'interprétation qui caractérise quelquefois notre modernité.
En dépit de son statut inférieur, ou bien plutôt grâce à celui-ci, la littérature enfantine favorise un tel questionnement qui ne peut manquer de s'appliquer à toute la Littérature.