Ce “Bronson” d’Arnaud Sagnard est un sacré bon roman, l’un de ceux qu’un auteur nourrit longuement avant de se mettre au travail. Charles Bronson est l’un de ces acteurs emblématiques du cinéma hollywoodien qui a tourné une quantité de films hallucinante, un homme au sourire énigmatique sur lequel on a beaucoup écrit. Sagnard tente de saisir le fond de cette énigme en examinant au plus près ce qui a progressivement constitué le mythe Bronson.
Bronson est un gamin d’Erhenfeld, en Pennsylvannie, au coeur des montagnes des Appalaches, à mi-chemin entre Pittsburgh et Harrisburg.
Erhenfeld est une ville minière où l’on travaille dur pour quelques dollars. Charles Bunchinsky est issu d’une famille de treize enfants dont une bonne partie travaille au fond de la mine suivant l’exemple du père. Charles sera le premier de la famille à aller au lycée. De son côté Arnaud Sagnard est un gamin de Charenton le Pont loin d’être aussi costaud que le jeune Bunchinsky. Le lecteur va suivre les lignes de vie des deux hommes, l’un poursuivant l’autre, fouillant chaque recoin de son existence, examinant une filmographie où le meilleur côtoie souvent le pire. Sagnard ne nous propose pas un exercice d’admiration. Pour lui Bronson n’a rien d’un héros du cinéma américain , il le voit plutôt comme une incroyable machine à faire des films, une brute de travail dont l’économie du jeu d’acteur n’a d’égale que les angoisses qui le tenaillent et qu’il tente de conjurer en s’oubliant sur les plateaux.
Entre le jeune Arnaud et l’acteur américain va se nouer un lien qui va s’approfondir avec le temps. Charles Bunchinsky devenu Bronson va tourner pendant près de 50 ans et l’enquête de Sagnard va tourner à l’obsessionnel : voyages aux Etats Unis sur les lieux où vécut l’acteur, visionnage de centaines d’heures de la filmographie bronsonienne, lecture de tout ce qu’on a pu écrire sur la plus mutique des stars d’Hollywood. Celui qui fut l’une des figures du justicier américain à travers le personnage de Kersey véritable assassin sans mobile qui erre la nuit dans les rues. “Les victimes changent au gré des peurs de l’Amérique, les délinquants en maraude laissent place aux organisations trafiquant de la drogue et à la mafia.” Ces films sont médiocres mais Bronson est l’un des rouages d’un Hollywood qui se nourrit à l’époque de la duplication du même film décliné dans des suites plus mauvaises les unes que les autres et de celle des cassettes VHS. Le cinéma américain est système industriel qui peut faire de l’image d’un homme dans un miroir le symbole reproductible à l’infini des obsessions d’une société.
Bronson mourra en 2003 d’une pneumonie, mais l’enquête de Sagnard ne faisait alors que commencer débouchant sur un roman qu’on lit d’une traite. Ce “Bronson” met à jour comment l’acteur survécut à ses peurs en tournant inlassablement des films dont la qualité importait peu et comment le cinéma hollywoodien l’utilisa jusqu’à l’écoeurement. Le mythe en prend un coup mais l’intelligence en ressort grandit.
Archibald PLOOM (CULTURE-CHRONIQUE.COM)
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Ce “Bronson” d’Arnaud Sagnard est un sacré bon roman, l’un de ceux qu’un auteur nourrit longuement avant de se mettre au travail. Charles Bronson est l’un de ces acteurs emblématiques du cinéma hollywoodien qui a tourné une quantité de films hallucinante, un homme au sourire énigmatique sur lequel on a beaucoup écrit. Sagnard tente de saisir le fond de cette énigme en examinant au plus près ce qui a progressivement constitué le mythe Bronson.
Bronson est un gamin d’Erhenfeld, en Pennsylvannie, au coeur des montagnes des Appalaches, à mi-chemin entre Pittsburgh et Harrisburg. Erhenfeld est une ville minière où l’on travaille dur pour quelques dollars. Charles Bunchinsky est issu d’une famille de treize enfants dont une bonne partie travaille au fond de la mine suivant l’exemple du père. Charles sera le premier de la famille à aller au lycée. De son côté Arnaud Sagnard est un gamin de Charenton le Pont loin d’être aussi costaud que le jeune Bunchinsky. Le lecteur va suivre les lignes de vie des deux hommes, l’un poursuivant l’autre, fouillant chaque recoin de son existence, examinant une filmographie où le meilleur côtoie souvent le pire. Sagnard ne nous propose pas un exercice d’admiration. Pour lui Bronson n’a rien d’un héros du cinéma américain , il le voit plutôt comme une incroyable machine à faire des films, une brute de travail dont l’économie du jeu d’acteur n’a d’égale que les angoisses qui le tenaillent et qu’il tente de conjurer en s’oubliant sur les plateaux.
Entre le jeune Arnaud et l’acteur américain va se nouer un lien qui va s’approfondir avec le temps. Charles Bunchinsky devenu Bronson va tourner pendant près de 50 ans et l’enquête de Sagnard va tourner à l’obsessionnel : voyages aux Etats Unis sur les lieux où vécut l’acteur, visionnage de centaines d’heures de la filmographie bronsonienne, lecture de tout ce qu’on a pu écrire sur la plus mutique des stars d’Hollywood. Celui qui fut l’une des figures du justicier américain à travers le personnage de Kersey véritable assassin sans mobile qui erre la nuit dans les rues. “Les victimes changent au gré des peurs de l’Amérique, les délinquants en maraude laissent place aux organisations trafiquant de la drogue et à la mafia.” Ces films sont médiocres mais Bronson est l’un des rouages d’un Hollywood qui se nourrit à l’époque de la duplication du même film décliné dans des suites plus mauvaises les unes que les autres et de celle des cassettes VHS. Le cinéma américain est système industriel qui peut faire de l’image d’un homme dans un miroir le symbole reproductible à l’infini des obsessions d’une société.
Bronson mourra en 2003 d’une pneumonie, mais l’enquête de Sagnard ne faisait alors que commencer débouchant sur un roman qu’on lit d’une traite. Ce “Bronson” met à jour comment l’acteur survécut à ses peurs en tournant inlassablement des films dont la qualité importait peu et comment le cinéma hollywoodien l’utilisa jusqu’à l’écoeurement. Le mythe en prend un coup mais l’intelligence en ressort grandit.
Archibald PLOOM (CULTURE-CHRONIQUE.COM)